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App ou papier ? Que choisir pour consigner ses observations
ParMarie
Lorsque l’on commence à observer ses cycles menstruels avec une méthode symptothermique telle que la méthode Faries, on se pose généralement la question de l’utilité ou non d’utiliser une app pour consigner ses observations.
En effet, dans le marché actuel, l’offre d’applications de suivi du cycle est de plus en plus étoffée, il y a de quoi se perdre dans les propositions.
Mais au fait, avant de se lancer dans un comparatif des différentes app à télécharger sur son smartphone, est-ce vraiment préférable d’utiliser une app ? Ou peut-on se satisfaire d’en rester au bon vieux papier et crayon ?
Quels sont les avantages et les inconvénients de chacune de ces options ?
Personnellement, je préfère et privilégie l’utilisation de graphiques sur papier, et c’est d’ailleurs ce que j’encourage à faire.
Mais pourquoi donc ? Ne serait-ce pas un peu oldschool, à l’ère de chatGPT, des smartphones et des nouvelles technologies superintelligentes qui font tout à notre place ?
C’est vrai, les app permettent d’entrer rapidement ses observations et d’y avoir accès facilement depuis son smartphone.
Pour certaines, elles peuvent être connectées par bluetooth à son thermomètre pour y transférer directement les températures dans le graphique, ce qui rend les oublis d’annotation moins probables.
Et certaines promettent même de faire l’interprétation des données à notre place.
Cela peut, de prime abord, sembler super, une application qui fait tout à notre place. Quelle réduction de charge mentale !
Mais au final, cela peut empêcher l’apprentissage correct de la méthode. En déléguant tout à la machine et ne faisant pas l’exercice d’interpréter soi-même ses observations, on risque des lacunes de compréhension des bases de la méthode, de rester dans de l’à peu près et de ne jamais devenir complètement autonome.
D’autant plus que l’on connaît rarement quel est l’algorithme exact qui est implémenté dans l’application que l’on utilise. Spoiler alert, toutes n’utilisent pas le même, et certaines se basent sur des statistiques de calendrier, ce qui est dangereux pour la sécurité contraceptive.
Par ailleurs, il me semble important de prêter une attention particulière à ce qui est fait de nos données personnelles par l’entreprise qui fournit l’app. Qui y a accès ? Ces données sont-elles strictement confidentielles ? Sont-elles revendues ? Utilisées à des fins de recherche ?
De son côté, l’utilisation des graphiques sur papier permet :
- une meilleure compréhension de la méthode, du fait que l’on doit tracer soi-même la ligne de vie (ligne de base des températures) et faire soi-même l’interprétation de ses observations
- une plus grande autonomie, tant dans la compréhension de la méthode en elle-même que dans l’indépendance par rapport à des outils électroniques qui doivent être rechargés et peuvent tomber en panne
- une meilleure gestion de ses données personnelles – qui sont, rappelons-le, des données de santé sensibles
J’ajouterais à cela que la pratique d’une méthode symptothermique nous ramène à une vision différente du temps, à sa cyclicité, et nous invite à rallentir.
Prendre le temps de remplir ses graphiques en conscience fait partie de cet espace que l’on s’accorde dans la reconnection à notre corps.
En tant que personne menstruée ET professionnelle de santé formée à une méthode de gestion naturelle de la fertilité (la méthode Faries), j’estime qu’il est extrêmement important d’acquérir des connaissances et des compétences qui nous permettent de comprendre le fonctionnement de notre corps et de nos cycles.
Utiliser une app pour cela, pourquoi pas…
Mais en gardant à l’esprit que tant qu’on ne comprend pas comment fonctionnent les algorithmes qui déterminent la période du cycle menstruel dans laquelle on est, on perd la maîtrise de la compréhension de son corps.
Tout dépend donc de nos objectifs :
- dans quel but je souhaite utiliser une app plutôt que du papier et un crayon ?
- quelles sont les compétences que je souhaite acquérir ?
- et quelles sont celles que je préfère déléguer à un algorithme ?
Dans mes accompagnements avec matriCare, j’enseigne les connaissances et compétences qui permettent de comprendre finement son cycle menstruel, dans l’optique de devenir complètement libre et autonome, pour in fine laisser même thermomètre, papier et crayon.
Ensuite, chacun·e a la liberté d’utiliser n’importe quel outil pour noter ses observations.
Ce n’est pas parce qu’on a des claviers pour taper nos textes et des logiciels de dictée qui écrivent à notre place qu’on cesse d’enseigner à nos enfants comment écrire avec un crayon.
Ce n’est pas parce qu’on a des correcteurs d’orthographe automatiques et des IA qui pondent un texte en trois secondes qu’on cesse d’enseigner à nos enfants la grammaire, l’orthographe, la conjugaison et l’art de rédiger et structurer un texte qui a de l’allure.
Ce n’est pas parce qu’on a des calculatrices et des ordinateurs hyperpuissants qu’on cesse d’enseigner à nos enfants comment additionner, soustraire, multiplier, diviser.
Au contraire ! Apprendre ces bases est FONDAMENTAL pour être capable d’utiliser ces outils de façon pertinente, utile et réfléchie – et de se débrouiller sans, dans les situations où ils ne sont pas ou plus disponibles.
Cela en va de même avec la littéracie corporelle – l’art de comprendre les messages de notre corps.
Cela peut peut-être sembler inutile de s’engager dans des mois, voire des années d’apprentissage pour obtenir des connaissances et des compétences que des machines ont déjà, mais en réalité, c’est la base de l’autonomie.
Et quand même, être autonome dans la gestion de sa fertilité, c’est, pour moi, un point fondamental !
Car le but ultime de la méthode Faries, c’est l’autonomie et la liberté.
C’est être capable de comprendre les messages de son corps sans aucune aide externe (même sans thermomètre, sans papier, sans crayon, oui, c’est possible).
Et ça, ça passe par l’apprentissage.
L’apprentissage demande de l’investissement, de l’énergie et du temps, mais la récompense est immense.
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